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Dix signes qui indiquent un potentiel de création d’alpha à long terme sur les marchés du crédit

Mardi, 07/21/2020

Le plus long marché actions haussier depuis la Seconde Guerre mondiale a eu pour effet de rehausser les valorisations et d’accroître l’effet de levier. Alors que le cycle se retourne, les multiples de valorisation sont appelés à se contracter et les niveaux d’endettement élevés exerceront une pression sur l’ensemble de la structure du capital.

Mardi 21/07/2020 - 09:34

La fragilité structurelle des marchés du crédit et la diminution des liquidités entraîneront probablement un regain de volatilité, une hausse des dégradations de notes de crédit, une montée en flèche des taux de défaut, une diminution des recouvrements et des conditions moins favorables pour les nouveaux prêteurs dans l’après-COVID-19.

Voici dix signes précurseurs d’une dégradation des fondamentaux, sources d’opportunités de création d’alpha à long terme pour les investisseurs alternatifs.

Les agences de crédit relâchent leur vigilance

Nous avons constaté une montée générale de l’endettement net depuis la crise financière mondiale. A titre d’exemple, les entreprises notées BB sont désormais plus endettées que leurs consœurs notées B ne l’étaient à l’époque. La vague de dégradation de notes de crédit qui se profile à l’horizon constituera donc un indicateur tardif.


La dette du secteur privé a triplé

Depuis 2009, le PIB a augmenté de 47 % – passant de USD 14'600 milliards à USD 21’500 milliards – tandis que les marchés des obligations d’entreprise ont presque triplé de volume. Au cours de cette même période, la dette des ménages américains a légèrement augmenté (+10 %) et les créances liées au logement sont restées stables. En revanche, le marché des titres de qualité Sub-Investment Grade s’est largement développé, tant dans le segment des obligations à haut rendement que dans celui des prêts à effet de levier.


L’endettement élevé met le PER sous pression

L’endettement a été multiplié par 1,5 en moyenne depuis la crise financière mondiale, voire par 3-4 pour certains secteurs cycliques. En ce qui concerne les prêts de type LBO, le niveau d’endettement est également nettement plus élevé. Parmi les grands LBO, l’endettement est encore plus massif, avec un ratio dette/EBITDA supérieur à 6x pour environ 60 % de l’univers.


Des ajustements de l’EBITDA se profilent

Les ratios de levier indiqués ci-dessus peuvent être trompeurs, étant donné que les ajustements – tels que les réintégrations et les informations pro forma – représentent souvent 20 % de l’EBITDA publié, ce qui conduit en moyenne à une hausse de 1x de l’endettement par rapport aux chiffres publiés.


L’essor des prêts aux conditions allégées

Les prêts aux conditions allégées (cov-lit) ont fortement augmenté depuis la crise financière mondiale. Ils représentent désormais plus de 80 % du marché américain des prêts à effet de levier de USD 1200 milliards. Sans ces protections, la performance d’une entreprise peut se dégrader significativement avant qu’un événement de crédit ne survienne.


Une hausse des taux de défaut

Les taux de défaut annuels ont atteint un pic d’environ 10 % durant les dernières récessions, contre l’équivalent de 13 % lors de la crise financière mondiale. Au regard des prêts aux conditions allégées, voire sans conditions, nous prévoyons un taux de défaut très bas à court terme. En revanche, nous tablons sur une dégradation des indicateurs et une potentielle hausse des taux de défaut d’ici la fin de l’année.


Une diminution des recouvrements

L’absence de conditions permet aux emprunteurs d’adopter un comportement attentiste, car les prêteurs n’ont pas la possibilité d’exercer une surveillance et de prendre les mesures nécessaires avant qu’il ne soit trop tard. Une diminution des recouvrements est à prévoir, étant donné que les événements de crédit devraient survenir une fois que les conditions financières et le bilan des emprunteurs se sont déjà considérablement détériorés.


Un socle d’investisseurs passifs

Depuis la crise financière mondiale, nous avons constaté une forte croissance des produits d’investissement passifs, ou gérés activement dans le cadre de mandats d’investissement rigides, pour lesquels il existe souvent une asymétrie de liquidité. Les prêts à effet de levier, notamment utilisés dans le secteur du capital-investissement, s’intègrent en grande partie dans des structures CLO, qui sont à leur tour détenues par une variété de prêteurs bancaires et non bancaires. La plupart de ces investisseurs passifs tendent à gérer différents « paniers de titres » et peuvent être contraints de vendre dans un environnement de crédit qui se dégrade.


Un manque de liquidité

Les activités de tenue de marché ont fortement diminué depuis la crise financière mondiale, car bon nombre de banques se sont désengagées et celles qui les ont maintenues ont dû les réduire. A titre d’exemple, le décompte des titres à haut rendement effectué par les teneurs de marché a chuté de 40 à 3 milliards de dollars, tandis que celui des obligations d’entreprise s’est réduit comme peau de chagrin, passant de 250 à 30 milliards.


Un regain de volatilité

Alors que les agences de crédit actualisent leurs dégradations de notes de crédit, certains investisseurs passifs seront contraints de céder des titres qui ne correspondent plus à leur mandat, créant des opportunités

Il semble que le segment le plus faible du marché soit celui des obligations Investment Grade moins bien notées. A mesure que leurs notations seront abaissées à Sub-Investment Grade, ces « anges déchus » accuseront d’importantes baisses de prix, surtout dans un environnement marqué par une liquidité limitée et face à un public beaucoup moins friand de titres à haut rendement.

Conclusion

En conclusion, l’environnement actuel créera de nombreuses opportunités pour les investisseurs vers la fin de l’année et au-delà — en 2021 et 2022. Dans ce contexte, nous nous concentrons sur les obligations d’entreprises en difficulté, la restructuration, le financement des litiges et le marché secondaire, ainsi que sur le capital-investissement, car toutes les sociétés ne seront pas touchées de la même manière. Les investisseurs rigoureux et sélectifs peuvent dénicher des poches de croissance élevée dans un contexte de récession. Nous mettons tout en œuvre pour tirer parti de ces conditions de marché, en misant sur la patience et la discipline, deux facteurs clés de réussite en phase de récession.